Si l’on demande à un aménageur, un urbaniste, un géographe, un sociologue, un ingénieur, un logisticien, un transporteur ou un opérateur de communication une définition de la mobilité, il y a fort à parier que nous obtiendrons autant de réponses différentes qu’il y aura d’interlocuteurs. Or, chaque discipline renvoyant à un champ de savoir spécifique, les échanges transversaux entre spécialistes se heurtent à la diversité des définitions. En effet, cette multiplicité loin d’enrichir la réflexion restreint les préoccupations de chacun à son domaine de compétence. La pluralité des acceptions de la mobilité oblige à se référer à des études menées tant par des urbanistes, des ingénieurs, des sociologues ou des anthropologues pour tenter d’appréhender les différents aspects de la mobilité. Ceci, alors que la mobilité est au centre des enjeux sociétaux, tant pour les personnes que pour les biens et pour les informations. Au fractionnement des conceptions de la mobilité spatiale se surimpose dans nos pratiques quotidiennes les choix individuels et collectifs que nous opérons pour utiliser le moyen le plus adapté à nos déplacements.
En ce qui concerne le marcheur, l’itinéraire de déplacement favorise une lecture sensorielle des réalités plurielles du paysage (cf. De quoi Scape est-il le suffixe ?) ainsi que les « Démarches » discursives.
D’après Vincent Kaufmann, professeur de sociologie urbaine et d’analyse de la mobilité (1), « La motilité peut être définie comme la manière dont un individu ou un groupe fait sien le champ du possible en matière de mobilité et en fait usage. On peut décomposer la motilité en facteurs relatifs aux accessibilités (les conditions auxquelles il est possible d’utiliser l’offre au sens large), aux compétences (que nécessite l’usage de cette offre) et à l’appropriation (l’évaluation des possibilités). Ces trois dimensions font système, elles se coproduisent et ne peuvent être abordées séparément. »
Le terme motilité emprunté au vocabulaire biomédical pour décrire la capacité d’un être vivant ou d’une cellule à se mouvoir est employé en sociologie par Zygmunt Bauman dans son ouvrage Liquid Modernity (paru en français sous le titre La vie liquide, éd Pluriel). On notera que l’adjectif « liquide » a fait florès dans le paysage photographique avec le livre et l’exposition «France[s] Territoire liquide », éditions du Seuil.
Nous définirons, dans le domaine du walkscape, la motilité comme la manière pour une personne ou un groupe de mobiliser les différentes variantes de la mobilité dans le but d’initier des projets. Cette potentialité ne se transformant pas nécessairement en mobilité spatiale. Il s’agit ni plus ni moins du capital de mobilité que nous sommes en capacité de mobiliser pour réaliser nos projets.
En résumé, la mobilité ne se réduit pas à un déplacement d’un point à un autre, il s’agit d’une activité à part entière mettant à contribution les potentialités de chacun suivant son capital de mobilité, c’est-à-dire sa motilité.
(1) Vincent Kaufmann, Dominique Joye (dir.), 2001, Enjeux de la sociologie urbaine, Lausanne, Presses polytechniques et universitaires romandes
Texte Jacques Clayssen